Human Rights Watch publie un rapport exposant les nombreuses lacunes du droit de la famille au Bangladesh. Rendant le divorce extrêmement difficile, des lois discriminatoires ont pour résultat de plonger les femmes divorcées dans la pauvreté.
Dans le rapport “Will I Get My Dues…Before I Die?” Harm to Women from Bangladesh’s Discriminatory Laws on Marriage, Separation, and Divorce publié aujourd’hui par Human Rights Watch (HRW), l’ONG affirme que les lois bangladaises régissant le mariage, la séparation et le divorce aggravent la pauvreté chez les femmes du pays. Rédigé par Aruna Kashyap, chercheuse pour l’Asie sur les droits des femmes, le rapport pointe le caractère discriminatoire envers les femmes du droit de la famille bangladais, ainsi que la très large non-application des quelques mesures de protection déjà existante.
Au Bangladesh, il n’existe pas d’égalité de droits sur les biens matrimoniaux en cas de séparation ou de divorce. Les femmes divorcées ou rejetées par leur mari se retrouvent sans ressources, bien souvent condamnées à la rue avec leurs enfants. Elles sont alors à la merci de la faim ou de problèmes de santé. Le Bangladesh a pourtant adopté en 2010 une loi contre les violences domestiques, accordant aux femmes le droit de rester dans la maison conjugales en cas de condamnation de leur mari. Mais obtenir une pension alimentaire devant les tribunaux aux affaires familiales relève d’une « course d’obstacles » selon HRW. Les preuves sont difficiles à fournir, de nombreux délais interviennent à chaque étape, et il arrive que les décisions ne soient pas exécutées.
Les programmes d’aide sociale prévus pour les femmes « abandonnées par leur mari », ou dont le mari n’a pas les moyens de fournir une pension alimentaire, ne sont pas davantage appliqués. Aucune des nombreuses femmes potentiellement bénéficiaires de ces programmes rencontrées par HRW n’y a eu accès, affirme l’ONG. La crainte de la pauvreté interdit de quitter un mari et/ou une belle-famille abusifs à beaucoup de Bangladaises.
Par ailleurs, les législations discriminatoires sur le divorce, fondées sur la religion (musulmane, hindoue ou chrétienne), n’ont pas été révisées depuis des décennies au Bangladesh. Dans tous les cas, le divorce est bien plus difficile pour les femmes que pour les hommes. Dans le cas de la communauté hindoue, il n’est même pas reconnu légalement. Par ailleurs, droits hindou et musulman du Bangladesh admettent la polygamie. Les quelques garde-fous juridiques encadrant les procédures de divorce ou la polygamie ne sont dans la plupart des cas pas appliqués.
Selon Aruna Kashyap, « Le Bangladesh (…) ferme les yeux sur la façon dont ses lois sur le statut des personnes précipitent de nombreuses femmes dans la pauvreté ». Le pays « devrait immédiatement réformer son code du statut personnel, améliorer ses tribunaux des affaires familiales, et fournir une aide d’État aux femmes pauvres ».
http://www.hrw.org/reports/2012/09/16/will-i-get-my-dues-i-die-0 (en anglais)
Yannick Le Bars